Semestre 1 de COVID-19 en Zone UEMOA : Focus sur la gestion de la crise en République du Bénin

Apparition du COVID 19 sur le continent Africain : 14 février 2020 (Egypte)
Apparition du COVID 19 en Zone UEMOA : 02 mars 2020 (Sénégal)
Apparition du COVID-19 au Bénin : 16 mars 2020
Apparition du COVID-19 au Burkina Faso : 09 mars 2020
Apparition du COVID-19 en Côte d’Ivoire : 11 mars 2020
Apparition du COVID-19 en Guinée Bissau : 25 mars 2020
Apparition du COVID-19 au Mali : 25 mars 2020
Apparition du COVID-19 au Niger : 19 mars 2020
Apparition du COVID-19 au Togo : 07 mars 2020

 

 

 

Contexte

L’épidémie de Covid-19 éprouve fortement les systèmes sanitaires et les économies des pays africains. Dès la confirmation du premier cas de contagion en mars 2020 au Sénégal, les plus optimistes ont espéré en vain une riposte groupée des pays de l’Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). En effet, depuis l’apparition du virus dans la zone, les politiques adoptées dans la majorité des pays de l’UEMOA ressemblent davantage à une polycopie des mesures déployées en Europe et en Asie, plutôt qu’à une adaptation de la riposte aux réalités économiques et socio-politiques de la zone.

Toutefois, comme une exception qui vient confirmer la règle, la République du Bénin a opté dès le départ pour des mesures permettant à ses citoyens de « vivre avec le virus ». Ces mesures ont permis au pays, en pleine crise sanitaire, de tenir des élections communales et de maintenir le trafic aérien actif.

Quels sont les ingrédients de la recette béninoise ? Quel est le niveau de performance atteint par le Bénin en comparaison des autres pays de la zone ? Quels grands enseignements se dégagent de la gestion de la crise par le gouvernement béninois ?

« Apprendre à vivre avec le virus »

Pour contenir la pandémie, dans un monde idéal, il aurait fallu décréter un confinement total des populations sur une période suffisamment longue pour traiter tous les cas de contagion enregistrés. Cependant, un tel confinement nécessiterait une économie durablement résiliente et de massives injections de liquidités de la part des autorités monétaires. Le confinement strict est donc un luxe que tous les pays ne peuvent pas s’offrir. C’est le cas des pays de l’UEMOA dont la majorité des populations vit en moyenne avec moins de 2 dollars US par jour. C’est une réalité que le gouvernement de la République du Bénin a vite intégrée dans sa politique de riposte.

  • Un cordon sanitaire plutôt qu’un confinement total

Dans le souci de contrôler la propagation du virus sur son territoire, le gouvernement béninois a établi un cordon sanitaire autour des communes les plus exposées par la pandémie. Entre autres mesures, le cordon sanitaire implique essentiellement une interdiction des entrées et sorties à l’intérieur du cordon et la fermeture des lieux de réjouissances et de culte (bars, discothèques, églises, mosquées, temples, etc.). D’abord étendu à 12 communes, le cordon sanitaire a ensuite été élargi à 15.

                                                  

  • Une sensibilisation massive de la population

Les informations sur le nouveau coronavirus remontaient à compte-goutte, au fur et à mesure que les spécialistes en découvraient les composantes. La République du Bénin a multiplié les interventions du Ministre de la Santé et des autorités sanitaires du pays pour tenir informée la population. Il a été mis en place une ligne d’écoute et d’assistance gratuite (136) accessible à la population. Des personnalités publiques (politiques, sportifs, acteurs, artistes, etc.) se sont associées à la réalisation de spots de sensibilisation dans plusieurs langues vernaculaires. Toutes les statistiques et informations liées à l’évolution et à la riposte contre la pandémie sont actualisées, publiées et accessibles sur le portail du site internet du gouvernement.

Apprendre à vivre avec le virus va de pair avec un système sanitaire solide, capable de détecter rapidement et de traiter efficacement les cas de contagion.

Renforcer le système sanitaire

En plus du cordon sanitaire et de la communication, la République du Bénin s’est dotée d’un arsenal sanitaire, gage d’une rapide détection et d’une prise en charge efficace des personnes contaminées.

  • Une volonté à tester massivement la population

L’une des conditions pour garantir la sécurité des populations sans confinement, est de tester autant de personnes que possible. Avec 118.206 tests réalisés de mars à août 2020, le Bénin est le troisième pays de la zone UEMOA qui réalise le plus de tests, derrière le Sénégal (147.162 tests) et la Côte d’Ivoire (127.804 tests). Lorsqu’on rapporte ces chiffres au million de population, le Bénin a réalisé plus de tests que tous les autres pays de la zone, comme le montre le graphique suivant.

Le pays teste systématiquement tout voyageur entrant et sortant du territoire national. Une quatorzaine est imposée à tous les voyageurs, nationaux et étrangers, foulant le sol béninois.

  • Un arsenal sanitaire adapté aux enjeux de la crise

Sans tergiverser, dès les premiers instants de la crise, le Bénin a mis en place un protocole de traitement basé sur l’hydroxy-chloroquine. De plus, grâce aux aides reçues des différents partenaires au développement, le pays a su mettre à niveau ses infrastructures sanitaires pour proposer une riposte solide. Entre autres dispositions, le Bénin a :

  • équipé en caméras thermiques 15 sites de surveillances aux frontières ;
  • construit et/ou aménagé 5 centres de traitement ;
  • construit 20 cabines de dépistage à l’aéroport international de Cotonou ;
  • rendu fonctionnels 13 laboratoires et 89 centres de dépistage.

C’est grâce à son arsenal sanitaire que le pays a pu atteindre un taux de guérison de 81% au 31 août 2020, soit 1 point de plus que la moyenne dans l’UEMOA.

A la date du 31 août 2020, seuls le Niger et la Côte d’Ivoire enregistrent de meilleurs taux de guérison que le Bénin dans la zone.

Outre le système sanitaire, la réussite de la riposte dépend fortement de la résilience socio-économique du pays.

Soutenir le tissu socio-économique
Au Bénin comme partout ailleurs, la gestion de la crise a été fortement accompagnée de dons divers. En plus de la riposte sanitaire, les dons ont servi à soutenir les couches socio-économiques les plus impactées par la crise.

  • Une aide sociale salvatrice

Entre autres mesures sociales, le gouvernement béninois a adopté :

  • une subvention de 5,76 milliards de FCFA au profit de tous les citoyens, sur les tarifs d’électricité et d’eau ;
  • une subvention particulière au profit des pauvres et extrêmes pauvres ;
  • une prise en charge de 50% de la hausse tarifaire sur les consommations d’électricité contenus dans la tranche 21kw/h à 200kw/h (soit 60% des consommateurs).

  • Une main tendue aux entreprises

Pour soulager la trésorerie des entreprises les plus affectées par la crise, l’état béninois a adopté les quelques mesures suivantes :

  • un appui de 4,98 milliards de FCFA destiné aux artisans et à ceux qui exercent de petits métiers ;
  • un soutien d’un montant 63,38 milliards FCFA, consenti aux entreprises pour :
    • prendre en charge 70% du salaire brut des employés déclarés sur une période de trois mois ;
    • rembourser les crédits de TVA ;
    • exonérer du paiement des Taxes sur Véhicules à Moteur (TVM) ceux qui ne l’ont pas encore payée au titre de l’année 2020 ;
    • convertir les Taxes sur Véhicules à Moteur (TVM) en crédit d’impôt 2021 pour ceux qui l’ont déjà payée en 2020 ;
    • prendre intégralement en charge les factures d’électricité pendant trois mois des hôtels et agences de voyages à hauteur de 4,1 milliards de FCFA ;
  • un fonds de bonification de 30 milliards de FCFA pour garantir une ligne de crédit de 100 milliards de FCFA à taux zéro au profit des acteurs économiques ciblés via les établissements bancaires et les Systèmes Financiers Décentralisés (SFD).

Pour anticiper la pénurie mondiale de masques, le gouvernement a eu recours aux artisans tailleurs et couturiers locaux pour accroitre le stock national de masques.

                                     

Le Bénin : un cas d’école ?
La crise sanitaire a éprouvé tous les systèmes d’administration et de gouvernance du monde. Ce n’est qu’à la fin de la pandémie que des conclusions solides pourront être tirées sur la gestion adoptée par les uns et les autres.
Pour l’heure, la plupart des pays de la zone UEMOA sont allés à l’école de l’Occident. La République du Bénin a fait le pari d’une stratégie décalée, porteuse de résultats encourageants, du moins sur ce premier semestre de COVID-19. Le pays détient l’un des meilleurs taux de guérison de la sous-région et réalise plus de test que ses voisins, au million de population près. Enfin, le Bénin est le troisième pays de la zone à enregistrer le taux de décès le plus faible du au COVID 19.

 

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